La Grande Muraille Verte : la tentative ambitieuse de l’Afrique pour lutter contre la désertification

À mesure que notre climat change, nous craignons que des températures plus chaudes et des conditions plus sèches ne nous compliquent la vie. Dans la plupart des endroits, il s’agit d’une préoccupation future qui semble inconfortablement proche, mais pour certains endroits, elle est déjà bien réelle. Prenons par exemple le désert du Sahara et les paysages dégradés du sud, dans le Sahel. Ces régions arides sont si sèches qu’elles ont du mal à accueillir la vie, et les températures y augmentent plus rapidement que presque partout ailleurs sur la planète.

Face à cette menace croissante, l’une des initiatives les plus visionnaires en cours est la Grande Muraille Verte d’Afrique. Il s'agit d'un projet de grande envergure qui vise à redonner vie à un terrain aride.

Un mur vivant

Des efforts concentrés ont contribué à redonner vie aux terres arides. Crédit : PAM

Lancée en 2007 par l’Union africaine, la Grande Muraille Verte était à l’origine une tentative d’arrêter le désert dans son élan. Le désert du Sahara s’étend depuis longtemps et la région du Sahel est en train de perdre la bataille contre la désertification. La Muraille Verte espère mettre un terme à cette situation, tout en améliorant la sécurité alimentaire dans la région.

Le concept du mur est simple. L’idée est de récupérer des terres dégradées et de leur redonner vie, en créant une bande verte à travers toute l’Afrique qui résisterait à la propagation de la désertification vers le sud. Destiné à s'étendre sur le continent du Sénégal à l'ouest jusqu'à Djibouti à l'est, il devait initialement mesurer 15 kilomètres de large et 7 775 kilomètres de long. L’espoir était d’achever le mur d’ici 2030.

Le concept de la Grande Muraille Verte a dépassé les idées initiales consistant simplement à planter un véritable mur d’arbres. Il s’est finalement transformé en un projet plus vaste visant à créer une « mosaïque » de paysages verts et productifs pouvant soutenir les communautés locales de la région.

La reforestation est au cœur de la Grande Muraille Verte. Des millions d'arbres ont été plantés, avec des espèces soigneusement choisies pour maximiser le succès. Des arbres comme l’acacia, le baobab et le moringa sont couramment plantés non seulement pour leur résilience dans les environnements arides, mais aussi pour leurs avantages économiques. Les acacias, par exemple, produisent de la gomme arabique, un ingrédient précieux dans les industries alimentaire et pharmaceutique, tandis que les arbres Moringa sont réputés pour leurs feuilles nutritives.

Le choix de plantes ayant une valeur économique a un effet secondaire très important qui pérennise le projet. Si des arbres aléatoires de peu de valeur étaient plantés uniquement à titre de mesure environnementale, ils ne dureraient probablement pas longtemps. Ils pourraient être récoltés par la communauté locale comme bois de chauffage en peu de temps, annulant ainsi tout le travail acharné effectué pour les planter. Au lieu de cela, en choisissant des espèces qui ont une valeur productive continue, cela donne à la communauté locale une raison d’entretenir et de soutenir les plantes.

Des travaux de terrassement spéciaux contribuent également à la lutte pour réparer les terres stériles. Dans des endroits comme la Mauritanie, les communautés ont creusé des mottes en demi-lune dans le sol. L'eau peut facilement s'écouler ou s'écouler sur la saleté dure et compactée. Cependant, les structures en demi-lune emprisonnent l’eau dans les mottes et la bordure surélevée forme une barrière protectrice. Ces mottes peuvent ensuite être utilisées pour planter diverses espèces où elles seront entretenues par l'eau capturée. Faites cela suffisamment de fois sur un paysage aride, et avec un peu de pluie, des terres autrefois mortes peuvent être ramenées à la vie. Il s’agit d’une technique traditionnelle à la fois peu coûteuse et efficace pour redonner du vert aux terres brunes.

Progrès

Le projet a été l'occasion de planter des plantes économiquement intéressantes qui se sont révélées utiles aux communautés locales. Crédit : PAM

L’initiative prévoit de restaurer 100 millions d’hectares de terres actuellement dégradées, tout en séquestrant 250 millions de tonnes de carbone pour contribuer à lutter contre le changement climatique. Les progrès ont été considérables, mais en même temps limités. À la mi-2023, le projet avait restauré environ 18 millions d’hectares de terres autrefois dégradées. Cela représente beaucoup de terres à tous points de vue. Et pourtant, cela représente moins d’un cinquième du total que le projet espérait réaliser. Le projet a été contrecarré par des problèmes de financement, des retards et la situation sécuritaire dégradée dans certaines des zones concernées. Dans l’ensemble, tout cela est de mauvais augure pour les chances du projet d’atteindre son objectif d’ici 2030, étant donné que 17 années se sont écoulées et que nous nous rapprochons de plus en plus de 2030.

Même si le projet n’a peut-être pas atteint ses objectifs les plus élevés, cela ne veut pas dire qu’il a été vain. La Grande Muraille Verte ne doit pas nécessairement être considérée comme une proposition du tout ou rien. Ces 18 millions d'hectares qui ont été récupérés ne sont pas rien, et on imagine que les communautés de ces régions profitent des avantages de leurs terres nouvellement améliorées.

Dans les régions les plus sèches du monde, il peut être difficile de trouver de bonnes terres. Même si la Grande Muraille Verte ne couvre pas encore le continent africain, elle a quand même un effet. Cela montre aux communautés qu'avec les bonnes techniques, il est possible de sortir certaines zones stériles du gouffre, les transformant ainsi en terres productives utiles. C'est au moins un bon héritage, et si les objectifs du projet peuvent être atteints ? Tout le meilleur.

François Zipponi
Je suis François Zipponi, éditorialiste pour le site 10-raisons.fr. J'ai commencé ma carrière de journaliste en 2004, et j'ai travaillé pour plusieurs médias français, dont le Monde et Libération. En 2016, j'ai rejoint 10-raisons.fr, un site innovant proposant des articles sous la forme « 10 raisons de... ». En tant qu'éditorialiste, je me suis engagé à fournir un contenu original et pertinent, abordant des sujets variés tels que la politique, l'économie, les sciences, l'histoire, etc. Je m'efforce de toujours traiter les sujets de façon objective et impartiale. Mes articles sont régulièrement partagés sur les réseaux sociaux et j'interviens dans des conférences et des tables rondes autour des thèmes abordés sur 10-raisons.fr.