Ceci est le manuel opérationnel du groupe de libération animale le plus technophile des États-Unis

En fait, dans une majorité surprenante de cas, les enquêteurs de DxE constatent que les portes restent ouvertes dans les complexes agricoles, explique Bernier, en raison de la taille des installations, du nombre d’ouvriers qui y travaillent et de leur forte rotation de l’emploi. Lors de l’une de ses premières enquêtes, Bernier raconte qu’il a passé 45 minutes à essayer de crocheter une serrure de porte avant de se rendre compte qu’il y avait une porte non verrouillée de l’autre côté du bâtiment. À une autre occasion, dit-il, il a trouvé une serrure à combinaison ouverte qui était toujours réglée sur la combinaison utilisée pour les cadenas dans l’ensemble de l’établissement. « Le type de vulnérabilités qui entraînent réellement des problèmes ne sont pas, par exemple, le fait que vous n’ayez pas mis à jour vos verrous avec tous les verrous Assa Abloy », explique Bernier. « Il s’agit de réparer l’énorme trou dans la grange ou de fermer les fenêtres la nuit. »

Lorsqu’il s’agit de communications sécurisées, le guide de DxE met l’accent sur les recommandations habituelles en matière de cybersécurité et de confidentialité en ligne. Le groupe utilise l’application de messagerie cryptée Signal, avec des messages qui disparaissent selon ce que Bernier décrit comme un délai « ennuyeux » court pour chaque conversation possible, qu’il s’agisse de sujets sensibles ou de planification quotidienne. Il décrit également l’utilisation du logiciel d’anonymat Tor pour la navigation sur le Web liée aux enquêtes et du moteur de recherche axé sur la confidentialité DuckDuckGo pour la recherche.

Si un téléphone doit être emporté lors d’une enquête, le guide décrit l’utilisation d’un téléphone graveur, avec des règles de sécurité opérationnelles strictes : acheté dans un magasin physique, conservé loin du domicile d’un enquêteur, rangé dans un sac Faraday lorsqu’il n’est pas utilisé, et jamais laissé au même endroit que le téléphone non graveur de quelqu’un.

Cependant, pour les communications du groupe sur le terrain au cours des enquêtes, le manuel décrit l’utilisation de radios portables plutôt que de téléphones. Il comprend un aperçu détaillé des différentes options et modèles, mais désigne finalement les appareils de la série Hytera PD7 comme ses radios préférées : ils offrent un cryptage AES fort, ainsi que des casques ou des écouteurs qui leur permettent d’être utilisés en silence. « Les radios cryptées constituent certainement l’un des moyens de communication les plus sûrs, car elles sont à courte portée et ne sont pas du tout mises en réseau », explique Bernier.

Un dernier recours

La publication par DxE de son manuel d’enquête soulèvera sans aucun doute de nouvelles critiques selon lesquelles DxE encouragerait des actions dangereuses ou même permettrait à d’autres types d’acteurs illégaux comme des voleurs ou des terroristes. À ces critiques potentielles, Bernier souligne que le manuel omet les techniques d’intrusion spécifiques qui pourraient être utilisées à mauvais escient et qu’il est entièrement non violent dans ses recommandations, même si les opérations qu’il décrit sont illégales dans de nombreux cas. «Je pense que ce guide s’adresse très clairement aux personnes ayant l’intention de dénoncer l’injustice de manière non violente», affirme Bernier.

Tout en encourageant d’autres personnes à rejoindre la mission de DxE, il affirme que la publication du guide est une reconnaissance du fait que des groupes du monde entier, de l’Europe à l’Australie en passant par l’Amérique du Sud, mènent déjà des enquêtes similaires à celles de DxE. Il dit que le guide est une tentative de créer un centre d’information entre ces groupes.

Bernier note également que même si les tactiques d’intrusion de DxE peuvent sembler radicales, ce sont précisément ces types d’opérations qui ont joué un rôle clé dans tout, depuis l’activisme contre la guerre nucléaire jusqu’à la révélation du scandale COINTELPRO du FBI, en passant par le travail de base en matière de justice environnementale.

« Cela peut sembler extrême pour une personne moyenne, comme s’il n’était pas nécessaire de partager cette information. Mais il existe une longue histoire selon laquelle ce type d’enquêtes est crucial » pour les mouvements de justice sociale, dit Bernier. « C’est l’option de dernier recours. Si les gens sentent qu’ils se trouvent dans cette situation, s’ils veulent faire cela, ils devraient avoir les informations nécessaires pour le faire en toute sécurité. »

François Zipponi
Je suis François Zipponi, éditorialiste pour le site 10-raisons.fr. J'ai commencé ma carrière de journaliste en 2004, et j'ai travaillé pour plusieurs médias français, dont le Monde et Libération. En 2016, j'ai rejoint 10-raisons.fr, un site innovant proposant des articles sous la forme « 10 raisons de... ». En tant qu'éditorialiste, je me suis engagé à fournir un contenu original et pertinent, abordant des sujets variés tels que la politique, l'économie, les sciences, l'histoire, etc. Je m'efforce de toujours traiter les sujets de façon objective et impartiale. Mes articles sont régulièrement partagés sur les réseaux sociaux et j'interviens dans des conférences et des tables rondes autour des thèmes abordés sur 10-raisons.fr.