Ils veulent installer un télescope dans un cratère sur la Lune

Lorsque nous avons développé des télescopes, nous avons commencé à les utiliser au sol. L’humanité n’avait pas encore maîtrisé le vol propulsé, voyez-vous, sans parler d’aller au-delà de l’espace. Au fur et à mesure que la technologie se développait, nous avons réalisé qu’installer un télescope sur un satellite pourrait être utile, car cela éliminerait toute cette horrible distorsion de cette vieille atmosphère embêtante. Nous avons également développé des radiotélescopes lorsque nous avons réalisé qu’il existait des signaux électromagnétiques au-delà de la lumière visible qui nous intéressaient beaucoup.

Aujourd’hui, la NASA rêve encore plus grand. Et s’il était possible de construire un grand radiotélescope sur la Lune ?

Rendez-vous sur la face cachée de la Lune

Le concept de la NASA consiste à transformer un cratère lunaire en radiotélescope à l’aide d’un certain nombre de rovers coopératifs. Crédit : NASA, domaine public

Ce concept est sur les cartes depuis un certain temps. La NASA a créé un plan pour le radiotélescope Lunar Crater, ou LRCT. L’idée est que la NASA sélectionnerait un grand cratère sur la face cachée de la Lune, d’environ 3 à 5 km de diamètre. Cette structure naturelle serait utilisée pour créer un gigantesque radiotélescope bien plus grand que ce qui pourrait autrement être raisonnablement construit et déployé par un vaisseau lunaire.

Le concept est naturellement assez compliqué, impliquant plusieurs robots travaillant ensemble pour construire la structure géante. Le concept consiste effectivement à construire une antenne parabolique de plus de 1 km de large. C’est bien plus que les plus grands radiotélescopes de la Terre, comme le FAST de 500 m en Chine et l’enveloppe détruite de 305 m de large qu’était Arecibo.

Pour y parvenir, un plan consisterait à placer un atterrisseur au centre du cratère, tandis qu’un atterrisseur secondaire atterrirait à l’extérieur du cratère, déployant plusieurs rovers « DuAxle ». L’atterrisseur dans le cratère déploierait des fils de guidage pour un treillis métallique afin de former la structure principale de la parabole. Les rovers spéciaux DuAxle s’ancreraient autour du périmètre du cratère, abaissant l’un de leurs essieux indépendants vers le centre du cratère sur une attache. Ces essieux indépendants aideraient alors à saisir les câbles de guidage pour étendre le treillis métallique sur le cratère. Pendant ce temps, d’autres rovers travailleraient ensemble pour hisser un récepteur au point focal de la parabole formée par la forme naturelle du cratère.

Les rovers DuAxle de la NASA peuvent se diviser pour permettre à l’un des essieux de descendre une pente raide grâce à une attache. Crédit : NASA

Si tout cela semble très compliqué, c’est parce que ça l’est. Cette méthode de déploiement nécessite la coopération de plusieurs rovers travaillant de manière synchronisée. Des erreurs ou des manœuvres inopportunes pourraient emmêler ou détruire le maillage assez facilement. Il y a aussi des questions de commandement et de contrôle. Obtenir des signaux sur la face cachée de la Lune n’est pas facile ; La NASA devrait soit installer un relais radio, soit faire confiance aux rovers pour faire leur travail de manière entièrement autonome.

L’agence spatiale a également exploré d’autres idées pour déployer la parabole. Une idée consiste à demander à un atterrisseur de déployer le maillage en le projetant lors de sa descente dans le cratère. Alternativement, l’atterrisseur pourrait s’installer dans le cratère puis lancer son treillis métallique en lui tirant des projectiles, comme une sorte de canon à filet lunaire. Bien que ces méthodes réduisent quelque peu la complexité, elles posent un plus grand défi pour ancrer réellement le maillage sur la surface lunaire.

Quelle que soit la manière dont il est déployé, positionner le télescope sur la face cachée de la Lune est bénéfique pour faire de la science sérieuse. Le télescope serait naturellement protégé des émissions bruyantes de la Terre par la masse totale de la Lune elle-même. De plus, grâce à son emplacement, le télescope serait capable de capturer des fréquences inférieures à 30 MHz. Ces fréquences sont normalement inaccessibles en ce qui concerne la radioastronomie sur Terre, car les signaux de ce spectre provenant de l’espace ont tendance à rebondir sur l’ionosphère.

Des rovers seraient utilisés pour aider à placer un récepteur sur l’antenne parabolique en treillis métallique. Crédit : NASA

La NASA n’est pas la seule à penser que la face cachée de la Lune pourrait être un bon endroit pour observer. En collaboration avec des partenaires internationaux, la Chine a développé son propre projet d’observation du ciel depuis la face cachée de la Lune, visant également à étudier le spectre radioélectrique. Tout comme le plan de la NASA, l’idée est de sortir de l’ionosphère terrestre pour écouter des ondes basse fréquence, afin de nous aider à en apprendre davantage sur l’âge des ténèbres de l’univers.

De nombreuses questions restent sans réponse en radioastronomie, principalement en raison des limites de notre humble Terre. Installer un radiotélescope de l’autre côté de la Lune, soit en orbite, soit à la surface, pourrait être un moyen clé de percer davantage de secrets sur l’univers primitif. Ce ne sera pas une mince affaire, mais la NASA a réalisé des missions de plus en plus complexes au cours de chaque décennie. Un radiotélescope lunaire pourrait bien être le prochain exploit incroyable réalisé grâce à une ingénierie de haut niveau et une flotte de robots utiles.

La vue depuis le cratère serait incroyable, mais la NASA ne voudrait probablement pas que vous piétiniez là-bas. Crédit : NASA

Pour l’instant, les travaux se poursuivent. La NASA ne s’est pas encore engagée dans une mission de déploiement du LCRT. Il est encore en phase de recherche, après avoir reçu un financement important pour développer et explorer davantage le concept. De nouveaux défis apparaissent également, car des zones de la Lune auparavant silencieuses sur le plan radio sont menacées. En fin de compte, ne vous attendez pas à voir un télescope lunaire l’année prochaine, mais attendez-vous à davantage de progrès sur ces concepts au cours de la prochaine décennie.

François Zipponi
Je suis François Zipponi, éditorialiste pour le site 10-raisons.fr. J'ai commencé ma carrière de journaliste en 2004, et j'ai travaillé pour plusieurs médias français, dont le Monde et Libération. En 2016, j'ai rejoint 10-raisons.fr, un site innovant proposant des articles sous la forme « 10 raisons de... ». En tant qu'éditorialiste, je me suis engagé à fournir un contenu original et pertinent, abordant des sujets variés tels que la politique, l'économie, les sciences, l'histoire, etc. Je m'efforce de toujours traiter les sujets de façon objective et impartiale. Mes articles sont régulièrement partagés sur les réseaux sociaux et j'interviens dans des conférences et des tables rondes autour des thèmes abordés sur 10-raisons.fr.