Pourquoi les Britanniques boivent-ils de la bière chaude ?

Voyager à travers l’Europe continentale avec un passeport britannique vous mène à plusieurs conversations prévisibles. Il y a la Marmite bien sûr, puis tout le fun de la foire du Brexit, et enfin plus sérieusement, la bière. Vous voyez, je ne le savais pas, mais après des décennies de bières fines, on me dit que nous le faisons mal parce que nous buvons notre bière chaude. « Chaude? », Dis-je, en pensant à un verre rafraîchissant de mon Old Hooky local qui est tout sauf chaud lorsqu’il est servi dans un pub du village d’Oxfordshire, pour recevoir la réponse qu’ils boivent leurs bières froides. Un peu de déchiffrement international plus tard, il ressort que « chaud » est ce que j’appellerais « froid », ou en fait « température ambiante », tandis que « froid » dans leur langage signifie « réfrigéré », ou comme je dirais il: « Trop froid pour goûter quoi que ce soit ». Mis à part l’humour léger, il y a clairement quelque chose qui se prépare, il est donc temps d’aller au fond de tout cela.

Trop froid pour goûter quoi que ce soit

Intérieur de pub britannique montrant des pompes sur le bar
À gauche dans ce pub londonien se trouvent les pompes à bière à main, à droite les distributeurs de pression, y compris les bières blondes. Edwardx, CC BY-SA 4.0.

Si vous entrez dans un pub britannique, en supposant que ce soit un bon pub, vous verrez une gamme de bières pression. Il y aura les grands leviers polis des pompes à main délivrant les bières locales, et il y aura à une extrémité du bar un ou deux distributeurs de fûts à pression argentés brillants avec quelques bières grand public. Celles-ci sortent généralement du robinet réfrigérées comme mes amis continentaux s’y attendraient, et incluent invariablement les bières blondes habituelles de style pilsener très annoncées. C’est alors sur ce bar que vous verrez en microcosme ce qui se cache derrière cette grande division de la bière, et l’indice est venu dans les noms « ale » et « lager ». Ce sont toutes les deux des bières, mais leurs styles différents révèlent l’histoire.

Pour faire de la bière telle que nous la connaissons, il faut faire bouillir une quantité de malt et de houblon dans de l’eau, ajouter une culture de levure et laisser fermenter un moment. C’est la recette de base, mais c’est dans la myriade de variations d’ingrédients et de lieux que l’on retrouve tous les styles différents que nous connaissons. Ces bières et bières blondes commencent de la même manière avec du malt et du houblon, mais c’est dans leurs cultures de levure qu’elles divergent. Les levures sont un type d’organisme unicellulaire et certaines variétés ont la propriété utile de produire de l’alcool lorsqu’elles consomment du sucre de manière anaérobie. Les levures sont partout autour de nous dans l’air, il est donc tout à fait possible de faire une bière en utilisant uniquement les levures naturelles qui se déposent dans le liquide sans avoir à ajouter une culture en tant que telle, c’est le processus derrière les bières lambic belges.

Tout est dans la levure

Une micrographie électronique de cellules de levure
Saccharomyces cerevisiae cellules au microscope électronique. Mogana Das Murtey et Patchamuthu Ramasamy, CC BY-SA 3.0.

Parce que les brasseurs apprécient la cohérence de leur produit et détestent risquer qu’un lot se détériore en raison d’une infection bactérienne, la plupart d’entre eux utilisent une culture. Il peut s’agir d’une bière spécifique à leur brasserie et d’un nombre incalculable de bières au fil des ans, ou d’une bière créée par un laboratoire. La famille des variétés de levure qui intéresse les brasseurs sont les Saccharomyces souches, et ce sont deux variétés différentes de Saccharomyces, Saccharomyces cerevisiae et Saccharomyces pastorianus, qui sont responsables des ales et des lagers à leur tour. Même dans ce cas, ce n’est pas aussi simple que de changer de levure, car elles ont chacune des propriétés très différentes. Les levures de bière fermentent rapidement à haute température et flottent au-dessus du liquide, tandis que les levures de bière blonde fermentent lentement et coulent au fond. C’est là que se trouve l’origine du mot « bière blonde », qui fait référence à la pratique consistant à stocker la bière dans des caves, ou à la conserver, au fur et à mesure qu’elle termine sa fermentation.

Nous avons maintenant une idée de la raison pour laquelle les ales et les lagers sont des types de bière différents, mais pourquoi les Britanniques boivent-ils leur ale à température ambiante ? Hackaday n’est pas une revue de bière, peu importe à quel point certains d’entre nous aimeraient passer plus de temps dans le pub, mais il est prudent de décrire une bière blonde comme ayant un goût plus léger qu’une bière, puis de faire l’observation que le premier a meilleur goût lorsqu’il est plus froid tandis que le second perd sa saveur s’il est réfrigéré. D’où ces pompes à main dans un pub britannique et mes amis continentaux perplexes face à une pinte britannique.

Nous sommes donc allés au fond de la question de la bière chaude, mais il y a une dernière injustice que je dois corriger. Les Britanniques se réfèrent à toute bière de style vaguement pilsener comme « lager » comme si c’était le seul style de bière blonde, alors qu’en fait les bières blondes viennent dans une vaste gamme de styles dont la pilsener n’est qu’un. Même dans ce cas, les pilseners que nous consommons choqueraient probablement un maître brasseur de Pilsen, tant leur fadeur est grande. Il est clair que nos amis continentaux ont beaucoup à apprendre sur les ales, mais par Bacchus, nous avons beaucoup à apprendre sur les lagers !

François Zipponi
Je suis François Zipponi, éditorialiste pour le site 10-raisons.fr. J'ai commencé ma carrière de journaliste en 2004, et j'ai travaillé pour plusieurs médias français, dont le Monde et Libération. En 2016, j'ai rejoint 10-raisons.fr, un site innovant proposant des articles sous la forme « 10 raisons de... ». En tant qu'éditorialiste, je me suis engagé à fournir un contenu original et pertinent, abordant des sujets variés tels que la politique, l'économie, les sciences, l'histoire, etc. Je m'efforce de toujours traiter les sujets de façon objective et impartiale. Mes articles sont régulièrement partagés sur les réseaux sociaux et j'interviens dans des conférences et des tables rondes autour des thèmes abordés sur 10-raisons.fr.