Revisiter la sagesse populaire pour le soin moderne des plaies chroniques

Dans la poursuite constante de l’innovation, il est facile d’oublier la sagesse du passé. La méthode scientifique et les techniques de recherche modernes nous ont apporté beaucoup d’innovations, ce qui peut souvent nous conduire à rejeter les croyances culturelles traditionnelles.

Cependant, parfois, il y a encore de précieux noyaux de vérité dans le folklore d’antan. Cela est vrai dans une étude médicale finlandaise, qui s’est concentrée sur l’utilisation traditionnelle de la résine d’épinette pour traiter les plaies chroniques, insufflant une nouvelle vie à une thérapie séculaire.

Un dilemme persistant

Les plaies chroniques sont définies comme des plaies qui ne suivent pas un processus de guérison normal et rapide. Bien qu’il n’y ait pas de calendrier strictement défini, les plaies sont généralement considérées comme chroniques si elles ne progressent pas à travers les étapes de guérison après quatre semaines à trois mois. Ces blessures représentent un fardeau important pour les systèmes de santé mondiaux. Ils créent une charge de travail importante pour le personnel de santé, sont coûteux et difficiles à gérer. Mais surtout, ils altèrent la qualité de vie des patients, qui souffrent de ces blessures pendant de longues périodes.

Les patients souffrant de plaies chroniques souffrent souvent d’autres problèmes de santé chroniques tels que l’âge avancé, la malnutrition ou les maladies vasculaires. Ceux-ci peuvent compliquer ou exclure les options de traitement qui autrement aideraient à résoudre le problème. Le traitement devient souvent un équilibre délicat entre la gestion des comorbidités sous-jacentes et la garantie d’un soin efficace des plaies. Tout nouveau traitement potentiel pour les plaies chroniques pourrait ainsi aider de nombreux patients coincés dans un bourbier médical inconfortable.

Une solution ancienne avec un potentiel moderne

La médecine traditionnelle regorge de remèdes transmis de génération en génération. Beaucoup d’entre eux ont été étudiés et se sont révélés inefficaces, l’huile de serpent, ou tout simplement pas très utiles. Beaucoup, cependant, doivent encore être explorés en profondeur par la science moderne.

La résine est appliquée soit directement sur la plaie, soit sur un pansement qui est ensuite appliqué. Crédit : Jokinen, Sipponen

Parmi ces remèdes traditionnels figure la résine de l’épinette de Norvège (Picea abies), une substance collante utilisée depuis des siècles pour soigner divers maux. Les chercheurs se sont tournés vers ce remède de l’ancien monde au cours des dernières décennies, étudiant son potentiel pour le soin moderne des plaies, inspiré par son utilisation par les générations passées.

Il s’avère que la résine d’épinette est un matériau complexe, composé d’une combinaison de divers acides résiniques et d’autres composés appelés lignanes, qui sont censés aider les plantes à décourager la consommation par les herbivores. Cependant, ils ont également une foule d’autres propriétés bénéfiques. Ces composés présentent une forte activité antimicrobienne et se sont avérés favoriser la cicatrisation des plaies et la régénération de la peau, éléments essentiels dans le traitement des plaies chroniques.

Bien sûr, la médecine moderne ne consiste pas à éplucher quelque chose d’un arbre, à le frotter et à espérer que cela aide. Au lieu de cela, le groupe de recherche s’est efforcé de quantifier les mécanismes d’action qui font de la résine d’épinette un agent apparemment efficace lorsqu’il s’agit de guérir les plaies chroniques.

La résine a pu empêcher les bactéries de subir une mitose, parfois en épaississant considérablement les parois cellulaires, comme le montrent les deux secondes images. Crédit : Jokinen, Sipponen

La recherche impliquait l’utilisation d’échantillons de résine pour attaquer les colonies de champignons et de bactéries dans des plaques de gélose, avec des expériences en milieu liquide également menées. Cela a aidé les chercheurs à qualifier les propriétés antimicrobiennes de la résine et à déterminer quels agents pathogènes la résine pouvait combattre efficacement. D’autres tests ont étudié la capacité de la résine à protéger contre l’infection à Staphylococcus aureus, les souches résistantes aux médicaments de la bactérie nocive étant actuellement très préoccupantes dans les hôpitaux du monde entier.

Les résultats ont confirmé que la résine était capable d’activité antimicrobienne en raison du fait qu’elle pouvait détruire les parois cellulaires et les membranes cellulaires des bactéries. D’autres mécanismes potentiels incluent une perturbation de l’approvisionnement énergétique de la cellule bactérienne. Pendant ce temps, on pense que le composant lignane de la résine peut également jouer un rôle. Ces produits chimiques ont des propriétés antioxydantes qui peuvent être utiles, et on soupçonne qu’ils peuvent subir une transformation en substances de type hormonal dans l’environnement de la plaie via le métabolisme microbien. On pense qu’ils peuvent alors jouer un rôle positif dans la régénération cellulaire dans la zone de la plaie.

Des techniques d’application ont également été explorées, la principale méthode consistant à étaler de la résine sur une zone de plaie avant de la recouvrir d’un pansement. Alternativement, il peut être appliqué sur un pansement puis placé sur une plaie. En règle générale, les pansements étaient laissés en place pendant un à trois jours en fonction de l’activité de la plaie.

Le document de recherche présente également plusieurs études de cas où les patients ont obtenu d’excellents résultats après le traitement à la résine de plaies chroniques, dont certaines souffraient depuis des années. Les images avant sont sanglantes, mais les images après montrent à quel point ce traitement peut être précieux. Les résultats d’un essai clinique de 2012, au cours desquels les 23 patients ont réussi à guérir leurs plaies chroniques en un temps moyen de 43 jours, viennent corroborer cette affirmation.

Regarder en arrière pour regarder devant

À bien des égards, cette recherche représente un point de rencontre entre l’ancien et le nouveau. C’est un puissant rappel que la sagesse de nos ancêtres peut toujours nous guider, que la poursuite du roman ne signifie pas toujours abandonner l’ancien. Alors que la communauté médicale s’efforce de résoudre le problème complexe des soins des plaies chroniques, l’intégration de ce remède traditionnel dans les stratégies de traitement modernes pourrait offrir une percée indispensable.

Ce mélange de connaissances traditionnelles et de rigueur scientifique moderne souligne le potentiel de transformation d’une telle recherche. Cela témoigne de la valeur de tirer sur les vieux fils. Parfois, nos ancêtres savaient vraiment de quoi ils parlaient, même s’ils ne pouvaient pas l’expliquer en termes scientifiques détaillés. Le pouvoir de guérison de la résine d’épinette de Norvège pourrait bien marquer une avancée significative dans le traitement des plaies chroniques, démontrant comment la science peut insuffler une nouvelle vie à la vieille sagesse. Ce voyage de la thérapie folklorique à une merveille médicale moderne potentielle se poursuit, chaque étape nous rapprochant de meilleurs résultats pour les patients.

(Image d’en-tête : Épinette de Norvège, Norbert Frank, Université de Hongrie occidentale, Bugwood.org)

François Zipponi
Je suis François Zipponi, éditorialiste pour le site 10-raisons.fr. J'ai commencé ma carrière de journaliste en 2004, et j'ai travaillé pour plusieurs médias français, dont le Monde et Libération. En 2016, j'ai rejoint 10-raisons.fr, un site innovant proposant des articles sous la forme « 10 raisons de... ». En tant qu'éditorialiste, je me suis engagé à fournir un contenu original et pertinent, abordant des sujets variés tels que la politique, l'économie, les sciences, l'histoire, etc. Je m'efforce de toujours traiter les sujets de façon objective et impartiale. Mes articles sont régulièrement partagés sur les réseaux sociaux et j'interviens dans des conférences et des tables rondes autour des thèmes abordés sur 10-raisons.fr.